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Olyrix, le 04/04/2022 |
Par Vojin Jaglicic |
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Liederabend, Paris, 3. April 2022
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Douceur et mélancolie avec Kaufmann et Damrau à la Philharmonie de Paris
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Diana Damrau et Jonas Kaufmann unissent
de nouveau leurs forces vocales pour des Lieder de Schumann et Brahms
accompagnés comme à leur habitude par Helmut Deutsch au piano, dans une
tournée européenne qui fait escale à la Philharmonie de Paris avec Les
Grandes Voix.
Après une collaboration sur les Lieder "italiens"
d'Hugo Wolf en 2018, le duo allemand formé par Diana Damrau et Jonas
Kaufmann renoue sa complicité artistique, autour de son répertoire national
piano-voix, cette fois avec Robert Schumann et Brahms (dans le cadre d'une
mini-tournée européenne qui fait comme auparavant une étape parisienne à la
Philharmonie). Le programme réunit des Lieder de divers recueils, mettant en
valeur les grands thèmes romantiques, tels que l'amour, la nuit, la nature,
la langueur, mais aussi la détresse qu'une âme sensible et poétique éprouve.
Deux grands compositeurs, maîtres du genre, qui sont aussi réunis par leur
amour (inconditionnel) pour Clara Schumann née Wieck, à laquelle est dédiée
une grande part de ces mélodies emplies de douceur et de mélancolie.
Jonas Kaufmann présente ce soir une ligne vocale immaculée et chaleureuse,
adossée à une prononciation naturelle et soignée jusqu'à l'excellence
(rendant justice tant aux compositeurs qu'aux poètes). Le phrasé baigne dans
la douceur et l'élégance, soutenu par une émission dosée mais suffisamment
ample pour pleinement combler cet espace acoustique hautement résonnant. Par
moments, il bascule vers le chant poitriné, plus volumineux et dramatique,
comme dans Stille Tränen (Larmes silencieuses), où il noircit les aigus en
les immergeant dans le ton mélancolique de la soirée. Si les cimes robustes
sont légèrement serrées et poussées, les notes piano représentent un sommet
de suavité et de maîtrise technique qui émeut l'auditeur In Waldeseinsamkeit
(Dans la solitude de la forêt).
Après une première partie plutôt
soliste (et entrecoupée par des sonneries de téléphone qui pourtant ne
déstabilisent pas les deux vedettes), la seconde moitié du concert est
majoritairement consacrée aux mélodies en duo. Les deux voix contrastées
s'alignent harmonieusement, alliant d'un côté le timbre sombre et les graves
charnus de Kaufmann, avec de l'autre la tendre luminosité de Diana Damrau.
Sa voix volatile et élastique tisse délicieusement les phrases mélodieuses
qui naviguent entre les sentiments de sérénité et de trouble. La douceur des
sections chantées piano et la finesse de la projection plongent le public
dans l'intimité du genre qu'elle maîtrise assurément. Sa prosodie
transparente et nettement articulée accomplit la fusion lyrique (totale) des
composantes musicales et poétiques, avec une ligne solide sur la justesse et
posée sur des aigus solaires qui vibrent plus (ou moins) intensément. Ces
instants mélodramatiques enrichissent le cours de son chant polychrome, mais
ramènent rapidement vers des eaux plus lyriques et caressantes.
Grand maître du Lied, professeur et collaborateur de longue date des deux
solistes, Helmut Deutsch fait une nouvelle fois la démonstration de son
autorité artistique dans son genre de prédilection. L'accompagnement qu'il
offre est égal et souverain, sa dentelle sonore délicatement brodée faisant
corps avec les parties vocales. L'usage de la pédale tend parfois à embrumer
quelques passages solo, mais renforce aussi la profondeur du caractère
romantique des chants présentés.
L'alchimie vocale du duo et
musicale du trio se traduit par de petits jeux scéniques qui font (sou)rire
aussi bien les artistes que le public. La soirée est couronnée par deux bis
offerts à l'auditoire qui rend en échange aux artistes des fleurs, des
cadeaux, ainsi que de longs et bruyants applaudissements.
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