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Olyrix, 23/01/2019 |
Par Céline Wadoux |
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Mahler: Das Lied von der Erde, Baden-Baden, 20. Januar 2019
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Triomphe de Jonas Kaufmann et du Chant de la Terre à Baden Baden
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La tournée Das Lied von der Erde (Le
Chant de la Terre) du ténor lui assure, en Forêt Noire, une ovation unanime,
dont les applaudissements s’adressent aussi au chef Jochen Rieder et à
l’Orchestre symphonique de Bâle.
Précédant Le Chant de la Terre
(1907), le programme propose Rendering (1989-1990), pièce orchestrale du
compositeur italien Luciano Berio. En reprenant les esquisses envisagées par
Schubert pour une Dixième symphonie en ré majeur qui n’a pu aboutir, Berio
livre une sonorité multiple, introduisant déjà les résonances de Mahler dans
son Andante, alors que d’autres passages sont organiques. Les cuivres et
harpes, très présents, rendent un effet de minéralité, de mouvement
terrestre, portés par la direction de Jochen Rieder, qui alterne large
amplitude du bras et précision millimétrée de la main, comme pour la suite
du programme.
C’est une déferlante d’applaudissements qui accueille
Jonas Kaufmann sur la scène de Baden Baden. Dans une posture très droite,
altière, le ténor fait se succéder les variations de timbres et de jeux de
scène. Au premier poème, le regard chaleureux devient abattu, la vie, la
mort, sont sombres (« Dunkel ist das Leben, ist der Tod »).
Dans les
passages légers, ainsi ce buveur qui se saoule jusqu’à plus soif, la raideur
première de sa posture s’efface, le sourire s’installe. Son écoute pour
l’Orchestre symphonique de Bâle est extrêmement attentive, pour saisir le
timbre d’une flûte ou d’un cor et le rendre par la voix. Lors de longs
passages symphoniques, point de retrait de la scène ni même de position
assise, mais une présence toujours forte, une contemplation absorbée de la
tendresse enveloppante des cordes consolatrices ou du cor bouillonnant.
Au fil des textes, légers ou sombres, le timbre s’adapte donc, sans
effort apparent. La portée d’un dernier « ewig » (éternel) soufflé,
quasi-murmuré, conclut une palette solide. Les aigus ne constituent pas une
simple démonstration de technicité ou de virtuosité à grands renforts de
trilles : ici, chaque son se suffit à lui-même sans effet grandiloquent. Les
vibratos, peu nombreux, sont de petites touches judicieusement placées, et
sont appuyés sans créer d’artificialité. Les médiums sont équilibrés, les
graves sûrs et pleinement audibles, les passages immédiats à l’aigu exécutés
en un tour de corde vocale. À la construction du timbre, en adéquation avec
chaque texte, s’ajoute une diction précise, claire, des syllabes détachées
et compréhensibles même dans les rythmes les plus emportés.
Avant
l’ovation quasi-unanimement debout de la salle, et la farandole de cadeaux
distribués par les admirateurs (des fleurs aux peluches), Jonas Kaufmann
reste solennellement recueilli, les musiciens et le chef achèvent le dernier
« adieu » (Der Abschied) en suspendant, les uns leurs archets, l’autre sa
baguette, suspendant le souffle, suspendant le temps.
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