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Forum Opera, 27 Juin 2017 |
Par Jean Michel Pennetier |
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Verdi: Otello, Royal Opera House, London, 21. Juni 2017
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Otello - Londres (ROH)
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Premier Otello de Jonas Kaufmann...
Cette nouvelle prise de rôle était sans doute l’un des événements lyriques
les plus attendus de la saison. Vocalement, le ténor allemand remporte sans
conteste son pari. Dans une forme éclatante, Kaufmann offre une projection
impeccable, qui lui permet de passer sans problème le mur orchestral, et de
venir au bout de ce rôle épuisant sans fatigue apparente. Cette puissance
n’empêche pas de fines nuances, portées par un phrasé parfait et un jeu
subtil sur les registres mixte et de poitrine. Les aigus sont crânement
assurés, y compris le contre-ut sur « Quella vil cortigiana », ultime
manifestation de la masculinité bafouée d’Otello. L’intelligence du texte
est remarquable, mais sans excès surinterprétatifs. Enfin, le timbre sombre
sied particulièrement au personnage. L’interprétation scénique laisse en
revanche un peu dubitatif. Volonté du metteur en scène ou du chanteur
allemand, cet Otello se révèle plus proche d’un jeune romantique tourmenté
et peu sûr de lui, que du guerrier farouche dont l’assurance se fissure peu
à peu sous le coup des insinuations de Iago. Remplaçant Ludovic Tézier
écarté au début des répétitions, Marco Vratogna est un Iago de facture
classique, un brin histrionique ce qui explique sans doute son triomphe aux
saluts. Certaines grimaces nous ont pourtant semblé mal venues : pour ceux
qui l’entourent, Iago est un honnête homme ; comment dans ces conditions
faire confiance à un individu aussi louche ! Au positif, la voix offre la
puissance requise et le baryton est capable de belles nuances également,
avec là aussi un jeu sur les registres. L’intonation est en revanche parfois
approximative. Dramatiquement et vocalement, Vratogna et Kaufmann s'avèrent
complémentaires, avec une certaine complicité dans leurs duos. Maria Agresta
a pour elle un beau timbre et une projection respectable. Elle sait
également amener de beaux piani. Son interprétation reste toutefois un peu
extérieure : il manque à ce beau chant ce je ne sais quoi de force
dramatique qui donne le frisson. Les seconds rôles sont excellents. Frédéric
Antoun est un Cassio de luxe, au chant parfait. Thomas Atkins est davantage
un intéressant ténor de caractère. En Montano, Simon Shibambu offre une beau
timbre de basse. Kai Rüütel est une Emilia a la voix puissante, d’un bel
engagement dramatique ; In Sung Sim un ambassadeur d’une belle prestance.
Le spectacle de Keith Warner ne manque pas d’idées, bonnes ou mauvaises,
mais l’ensemble manque de cohérence. On apprécie par exemple la vision
maléfique de Iago en ombre chinoise, mais moins ses débordements où il
applique de force une sorte de masque mortuaire sur le visage d’Otello à la
fin de l’acte III. La mort d’Otello, dans un flot d’hémoglobine, n’émeut pas
davantage qu’un film gore. Côté décors, très stylisés, on apprécie une
certaine sobriété, empreinte d’élégance, mais sans rapport avec les costumes
: celui d’Otello, trop simple, contribue à dépouiller le héros de sa
prestance. A l’inverse, les vénitiens de l’acte III semblent sortir d’une
revue « à plumes ». Que viennent faire également dans cet environnement des
scènes de combats inspirés des Ninjas ?
A la tête de l’orchestre du
Royal Opera, en très bonne forme à l’exception des cuivres, Antonio Pappano
opte pour un tempo particulièrement rapide, une sorte de course à l’abime
survoltée. Cette célérité n’empêche pas le chef anglais de ciseler de
multiples détails de l’orchestration. Le concertato du finale de l’acte III,
donné ici dans sa version longue, est ainsi une merveille d’architecture
maîtrisée.
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