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artistik rezo, 11 décembre 2015 |
Hélène Kuttner |
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Berlioz: La damnation de Faust, Paris, Opera Bastille, 8. Dezember 2015
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Faust sur la planète Mars à l’Opéra Bastille
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Partant du principe qu’un mythe est le creuset de tous nos fantasmes, le
metteur en scène Alvis Hermanis associe le personnage de Faust à Stephen
Hawking, le scientifique de renommée mondiale cloué sur son fauteuil roulant
et communiquant grâce à son ordinateur. Sous les huées des spectateurs lors
de la première, cette Damnation de Faust se transforme sous nos yeux en
conquête high-tech de la planète Mars, annexée par les humains.
Faust, Méphisto et Stephen Hawking
Peut-on tout se
permettre à partir d’un livret d’opéra, parce qu’il a été écrit au milieu du
XIX° siècle et qu’il y raconte la dépression mélancolique d’un savant en
proie au mal de vivre pré-romantique ? Goethe, lu passionnément par Hector
Berlioz qui en compose le livret et la musique, écrit un poème dramatique
sur un Faust qui pactise avec le Diable, Méphistophélès, pour racheter une
jeunesse qu’il a brûlée et des plaisirs terrestres qui ne peuvent rivaliser
avec la splendeur de la nature. Tiraillé entre le bien et le mal, Faust
finit par perdre sa bien-aimée Marguerite, au cours d’une fatale passion qui
les perdra tous deux. Ainsi doublé du scientifique paralysé sur son fauteuil
roulant, le Faust incarné par le séduisant ténor allemand Jonas Kaufmann a
bien du mal à incarner le souffle et l’aspiration de cet anti-héros
tourmenté.
Luxure chorégraphique et vidéo
Le
projet du personnage est ici clairement développé : il s’agit du projet Mars
One, un projet américain qui propose à un panel de citoyens hyper-motivés un
aller, sans garantie de retour, sur la planète Mars. Des vidéos d’interviews
sont donc projetées, comme des films de la Nasa et des montages virtuels
inter-galaxies. La vidéo ne s’arrête pas là, proposant aux spectateurs des
extraits du « Peuple des Océans », de « Microcosmos » où apparaissent
cétacés, crustacés, escargots ou fourmis en gros plan s’affairant à faire
l’amour ou la guerre. La luxure, la débauche des sens proposée par
Méphistophélès sont ici symbolisées par des danseurs nus ou en slip,
enfermés dans des cages de verre, se trémoussant de manière saccadée pour
tenter d’attiser l’oeil et le désir du héros, qui reste de marbre. La
chorégraphie est signée Alla Sigalova.
Une interprétation
convaincante
Les chanteurs, dirigés par le chef Philippe
Jordan, ne déméritent pas. Le duo Faust et Marguerite parvient à nous
enchanter, en raison de la qualité vocale de Sophie Koch, attentive à
projeter et à saisir toutes les nuances musicales de son personnage et de
Jonas Kaufmann que l’on sent, dans la deuxième partie, plus expressif dans
les scènes de passion amoureuse. Malgré une scénographie qui enferme les
buissons ardents et verdoyants dans du Plexiglas, réservant la fureur des
éléments déchaînés par des projections de volcans, l’interprétation du
baryton-basse Bryn Terfel dans le rôle d’un Méphistophélès meneur de jeu est
particulièrement réussie. Voix claire et puissante, humour pervers, il est
parfait dans ce personnage qui fait basculer le héros dans une autre
planète. Avec de tels interprètes, nous aurions préféré un voyage plus
fantastique, plus mystérieux et moins lourdement sidéral. |
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