JDD, 15 Octobre 2010 
Nicole Duault
Schubert: Die schöne Müllerin, Paris, TCE, 14. Oktober 2010
 

Le ténor des ténors ennuie...

Mine romantique avec ses cheveux bouclés, voix d’or capable de tout interpréter, le ténor des ténors, l’Allemand Jonas Kaufmann (41 ans) est devenu la coqueluche des directeurs d’opéra et du public. Il s’est planté jeudi soir au Théâtre des Champs-Elysées en interprétant le cycle de La Belle Meunière de Schubert. A mourir d’ennui...

Il était inconnu voilà cinq ans lors de ses débuts au Châtelet dans un mémorable Fierrabras de Schubert puis à l’Opéra en interprétant un admirable Cassio d’Otelo . A peine remarqué par la critique! Il fut couronné star deux ans plus tard dans Fidelio de Beethoven au Palais Garnier puis lors d’un somptueux Werther de Massenet à la Bastille. Il est devenu le ténor le plus demandé de la planète. Son dernier disque d’airs d’opéras italiens (Universal) est une merveille.

Hélas, Kaufmann achoppe sur une médiatisation excessive et, à trop vouloir être partout en même temps, il déçoit. Comme ce fut le cas jeudi soir. Attendu par ses fans: une foule compacte envahissait le Théâtre des Champs-Elysées. Alors que tant de théâtres sont en ce début de saison à moitié vides, des candidats spectateurs réclamaient des places dès le métro de l’Alma. Dans la file d’attende, un passionné assurait avoir pris ses places depuis un an. Il fallait être bien malin pour trouver un siège en dernière minute!

Dans cette salle surbookée, frémissante du paradis au parterre, l’attente d’un moment de grâce était perceptible. Mal fagoté dans un habit peu seyant, le ténor est apparu crispé, mal à l’aise. Certes cette œuvre n’a pas l’éclat des opéras habituels. Ces poignants lieder de Schubert sont faits d’intériorité et de sensibilité retenus. Jonas Kaufmann mit au moins trois strophes avant d’entrer dans le poème. Quelques spectateurs en profitèrent pour bâiller, toussoter avant qu’il ne s’immerge dans l’historiette de ce meunier qui cherche à séduire en vrai ou en imagination la tendre meunière. On eut pourtant quelques instants de séduction et d’intensité dramatiques.

Tonnerre d’applaudissements. Mais le public qui a payé –fort cher- sa place est parti très vite alors que Kaufmann était prêt à enchaîner d’autres "bis". Kaufmann a un génie vocal. Mais jeudi soir on l’a presqu’oublié.






 
 
  www.jkaufmann.info back top