Opéra, Juni 2009
Monique Barichella
Puccini: Tosca, Zürich
Tosca, 9 avril 2009
 
Cette «nouvelle» Tosca zurichoise de Robert Carsen ne l’est pas vraiment. Il s’agit en fait de la production signée par le metteur en scène canadien pour l’Opéra de flandre en 1992, dans le cadre de son justement célébré cycle Puccini. Un spectade repris avec succès à l’automne 2006, à Anvers puis à Gand. On peut cependant parler de «recréation», Carsen ayant lui-même assuré les répétitions et repensé sa lecture en fonction d’un trio renouvelé. Alors que son concept repose entièrement sur le mythe de la Diva, avec des références constantes à Maria Callas, l’intérêt dramatique se porte cette fois davantage sur Cavaradossi et Scarpia, sans doute en raison de la personnalité hors du commun de leurs interprètes.

Rappelons que Carsen situe sa Tosca sur une scène d’opéra: un des éléments de l’extraordinaire décor d’Anthony Ward évoque dairement la Scala sur un des bas-côtés de la rampe et du rideau de scène fictifs. L’action se déroule donc entre une salle et des spectateurs imaginaires, sous les yeux du public de l’Opéra de Zurich, bien réel celui-ci... Avec une cohérence théâtrale jamais prise en défaut, le metteur en scène propose une lecture où la titulaire assure en permanence deux registres : elle doit être sincère avec ses partenaires, tout en s’adressant aux spectateurs que nous sommes. Ainsi, à la lin, Tosca s’élance de la scène pour se précipiter dans une fosse d’orchestre virtuelle, derrière les fausses lumières de la rampe.

Parmi les innombrables clins d’oeil d’une réalisation foisonnante, citons encore la sortie de la Diva au premier acte, harcelée par des fans sollicitant une dédicace sur le programme de salle de l’Opéra de Zurich, dont la couverture reproduit son portrait. Ou encore, en lever de rideau du II, Scarpia tirant voluptueusement des bouffées de son cigare, alors qu’on lit « Vietato fumare» sur le faux rideau de fer...

Emily Magee surmonte toutes les difficultés de cette mise en scène exigeante. Si la voix de la soprano est trop peu italienne de couleur et de sonorité, sa maîtrise de la langue comme sa musicalité sont irréprochables, tout particulièrement dans une Prière impeccablement détaillée. Surtout, cette Tosca a le mérite de s’accorder avec des partenaires d’exception mais, eux aussi, vocalement atypiques.

Outre son physique de jeune premier cinématographique, Jonas Kaufmann est un Cavaradossi rayonnant d’aisance, au chant généreux et raffiné, et pour tout dire irrésistible. Là encore, la couleur n’est guère latine, mais quel style! Thomas Hampson, quant à lui, pour ses débuts en Scarpia, défie la tradition, sans la rugosité et la noirceur de timbre auxquelles nous sommes habitués. Son élégance et sa réserve rendent son personnage encore plus terrifiant. Visage glacial, barbe naissante, cheveux gominés et plaqués, regard d’acier, sourire sardonique, ce Scarpia glace d’effroi.
Unique bémol, la direction lourde, trop souvent brutale et tonitruante d’un Carlo Rizzi qui n’a pas, loin s’en faut, la même conception des exigences pucciniennes que ses interprètes. il est vrai qu’il remplaçait — en alternance avec Paolo Carignani — Christoph von Dohnanyi, qui s’était retiré de la production pendant les répétitions.






 
 
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