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ResMusica, 25/10/2005 |
Andreas Laska |
Verdi: I Masnadieri, Filderstadt. Filharmonie. 23-X-2005
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Triomphe pour Verdi et ses brigands
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C’est autour de l’éminent poète allemand
Friedrich Schiller, mort en 1805, que tourne cette année la programmation
des « Herbstliche Musiktage Bad Urach », du Festival d’automne de Bad Urach,
non loin de Stuttgart, rendez-vous culturel fondé jadis par Hermann Prey.
Outre un grand nombre de concerts, de récitals et d’exposés traduisant la
fascination d’innombrables musiciens pour l’œuvre de Schiller, l’édition
2005 nous offre la rare possibilité d’assister à une représentation, ne
serait-ce qu’en concert, des Masnadieri de Giuseppe Verdi, opéra basé sur le
drame Die Räuber (les Brigands) du même Friedrich Schiller. Tout en
respectant les structures conventionnelles de l’époque, Verdi parvient à y
trouver des voies nouvelles, notamment dans l’accompagnement orchestral des
airs. Cependant, malgré ses atouts musicaux et dramatiques, malgré des rôles
gratifiants musicalement et scéniquement, cette composition du jeune Verdi
n’a su gagner les grands théâtres du monde lyrique. Pourquoi ? Est la
question qui semble s’imposer à la fin d’un concert qui aurait mérité un
cadre plus spectaculaire que la « Filharmonie » de Filderstadt, petite ville
située entre Bad Urach et Stuttgart, et surtout un public plus nombreux.
Ceux qui se sont déplacés, pourtant, se sont montrés enthousiastes :
applaudissements nourris dès la première scène, ovations à la fin.
La vedette de la soirée est sans aucuns doutes Jonas Kaufmann. Le jeune
ténor au répertoire aussi vaste que varié possède exactement la voix requise
pour les opéras du jeune Verdi : un timbre juvénile, homogène sur toute
l’étendue, une grande souplesse dans tous les registres, rendant justice à
l’héritage belcantiste de cette musique, la capacité de trouver mille
nuances et couleurs, enfin la vaillance indispensable pour les cabalettes et
les grands finales culminant dans des aigus impressionnants (jusqu’au
contre-ut). Grâce, entre autres, à une prononciation parfaite du texte
italien, Kaufmann parvient également à conférer une grande crédibilité au
personnage déchiré entre l’amour et la vengeance, cherchant le bonheur sans
le trouver. Amalia est la soprano allemande Elisabeth M. Wachutka,
interprète expérimentée, notamment de rôles wagnériens et straussiens. La
voix rappelle un peu la jeune Mara Zampieri, y compris des notes assez
droites dans le haut-médium et certains problèmes dans le registre grave. A
part cela, sa prestation force le respect. Sans aucune difficulté, elle plie
sa voix au legato verdien, surprend avec des vocalises précises et ose même
des suraigus. Le rôle du méchant Francesco a été confié au baryton ukrainien
Andriy Maslakov. Si son italien trahit ses origines, Maslakov connaît les
règles du phrasé verdien. La technique est sure, l’aigu un peu étroit, mais
facile. Côté interprétation il n’atteint pourtant pas le niveau de ses
collègues. C’est que le timbre, par ailleurs tout à fait agréable, manque
encore des couleurs nécessaires pour caractériser ce personnage cruel et
perfide. Massimiliano enfin, est interprété par Franz Hawlata. Il
impressionne avec sa voix puissante et ses graves résonnants en faisant
ainsi quasiment oublier certains défauts de justesse et un aigu plutôt
poussif.
Le grand succès de la soirée est également dû à la prestation sans faille
des Stuttgarter Choristen et de la Württembergische Philharmonie
Reuttlingen. Roberto Paternostro au pupitre se montre tout à fait à l’aise
avec cette musique : il respire avec les chanteurs, il sait créer des
moments de grande tension dans les finales et il a le sens du rythme
indispensable aux opéras du jeune Verdi. Espérons donc retrouver plus
souvent cette œuvre, mais aussi retrouver Jonas Kaufmann dans ce répertoire
qui lui convient autant. |
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