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ResMusica, 31/03/2005 |
Bernard Halter |
Verdi: Falstaff, Zürich, 30-III-05
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Du très beau linge pour Sir John !
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Du très beau linge ! L’expression, dans son sens
littéral, si elle peut s’appliquer sans peine aux très beaux costumes de
Clare Mitchell, ou permet de glisser une allusion empreinte d’humour au
sujet de la lingerie qui recouvre Falstaff dans sa corbeille au deuxième
acte, peut tout autant qualifier les chanteuses et chanteurs les plus en vue
de la distribution de ce Falstaff. A commencer par Ruggero Raimondi qui
semble taillé sur mesure pour ce rôle cocasse. La basse italienne mord dans
son personnage à pleines dents pour en dispenser toute la sève. Sans verser
dans la vulgarité ni user de manières caricaturales, il laisse ressortir sa
truculence et chante la faconde fleurie avec laquelle il clame son amour du
vin, de la bonne chair et des femmes. Ses graves sont encore d’une puissance
confondante et dotés d’une assise qui rend merveilleusement l’autorité de
son personnage, son extraction, même si par moment, plus haut dans la
tessiture, la voix se fait moins éclatante.
Plus uniforme vocalement, Michael Volle domine la distribution masculine. Sa
rondeur, le placement parfait de sa voix ainsi qu’un legato soutenu qui
n’entame jamais la crédibilité de ses instants de fureur en font en Ford
mémorable. Il fait montre –comme le reste du plateau– d’indéniables qualités
d’acteur. A ce titre, si le dispositif scénique et les costumes épousent le
livret au plus près, sans cultiver l’originalité comme une fin en soi, la
direction d’acteur et les mimiques y afférentes permettent aux chanteurs
d’exprimer avec clarté et naturel la psychologie des personnages campés.
Nombre de détails croustillants sont ainsi agréablement soulignés et ancrent
chacun et chacune dans son rôle respectif.
Eva Mei, qui a récemment interprété avec brio et finesse Violetta à Zurich
(lire l’article), chante Alice Ford de manière tout aussi convaincante,
donnant la réplique à une Meg Page (Stefania Kaluza) plus en retrait. La
reine des trois commères demeure sans conteste Annamaria Chiuri en Mrs
Quickly. L’alto dispose d’une étendue vocale impressionnante lui permettant
de timbrer les graves les plus abyssaux et de passer sans crier gare à des
parties plus aiguës sans que cela s’accompagne de la moindre difficulté.
Expressive et excellente actrice, elle a gagné les faveurs du public par
l’aspect sémillant de son rôle et aussi pour la malice avec laquelle elle se
plait à le servir avantageusement. Les rôles secondaires de Dr. Cajus,
Pistola et Bardolfo n’appellent aucune réserve.
En marge des tribulations de Sir John Falstaff se trouve l’idylle de Fenton
et Nanette. L’adaptation du librettiste Boïto a su conserver l’entrelacs
d’intrigues qu’affectionnait Shakespeare. La jeune femme (Martina Jankova)
trouve la candeur lumineuse inhérente à son rôle juvénile. Le ténor Jonas
Kaufmann qui lui tient lieu de soupirant déploie pour sa part un chant large
et intense, avec quelques accès de vérisme aux entournures. S’il possède une
voix lui permettant de s’acquitter de rôles plus lourds, il semble moins
bien caractérisé, par exemple, qu’un Yann Beuron, qui a chanté Fenton à Lyon
à la fin juin 2004 dans une –magnifique– production signée Peter Stein.
Dans la fosse, Nello Santi dirige avec poigne l’orchestre de l’opéra de
Zurich dont il tire, outre une précision et une concordance parfaite avec le
plateau, des sonorités franches et des traits très colorés. Chef d’opéra à
la très longue expérience du répertoire italien, Nello Santi est souverain
vis-à-vis de cette partition d’un Verdi octogénaire, dont il rend la
théâtralité exacerbée sans maniérisme, mais avec une rare efficacité. |
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Foto: Suzanne Schwiertz |
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