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Le Temps, 01 mars 2014 |
Julian Sykes |
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Envoûtant souffle schubertien
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Le ténor Jonas Kaufmann conjugue plénitude et candeur pour interpréter le cycle du «Voyage d’hiver» avec Helmut Deutsch |
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On
n’osait pas trop le croire, mais le miracle Jonas Kaufmann continue. Le
voici qui aborde le Voyage d’hiver de Schubert qu’il donnera à la fin du
mois au Grand Théâtre de Genève (inutile de dire que le concert est complet
de longue date!). Le ténor allemand a eu la sagesse d’attendre la
quarantaine pour interpréter ce cycle si exigeant vocalement et
émotionnellement.
Ce qui frappe, c’est la qualité du souffle, aux
lignes longues et souples (on pourrait parler de «divines longueurs»), dans
une continuité qui fait de chaque lied une station dans un cheminement
intérieur. Là où d’autres exacerbent les tourments du poète, ou soulignent
telle inflexion (ce qui est arrivé à Fischer-Dieskau), Kaufmann privilégie
le naturel. Avec son expérience de la scène lyrique, il apporte des accents
parfois fougueux (la voix devient soudain immense) qu’il tempère par des
nuances admirablement fouillées. Il joue sur les contrastes dans la densité
même du timbre, capable de suspendre la voix aux limites de l’impalpable –
presque détimbrée – sans pour autant qu’elle ne se décolore. Il fait
ressortir telle résonance dans son registre barytonal pour apporter un
surplus de poids émotionnel.
Est-ce parce qu’il s’agit d’un
enregistrement en studio? Le sentiment d’un effritement psychologique à la
fin du cycle (dans les derniers lieder surtout) n’est pas aussi tangible
qu’on le souhaiterait. Et pourtant, que c’est beau et intelligemment mené!
Le piano limpide et admirablement souple de Helmut Deutsch épouse cette voix
d’une grande sincérité d’âme.
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