Concertonet, 02/01/2010
Sébastien Foucart
Jules Massenet : Werther
 
 
Un double événement. Ce Werther sobre et exact imaginé par Benoît Jacquot marquait les débuts dans le rôle-titre de Jonas Kaufmann, ténor des plus en vue actuellement, et, aussi incroyable que cela puisse paraître, de Michel Plasson à l’Opéra Bastille. Le premier incarne avec une rare épaisseur et des moyens exceptionnels un Werther intrinsèquement romantique, pudique et touchant. Son timbre particulier et dépourvu du soleil d’un Alfredo Kraus convient à merveille. Le public ne se trompe pas : cette interprétation juste à tous points de vue récolte une colossale ovation. A lui seul, cet artiste fait tout le prix de cette publication, au point de figurer sur la couverture.

Le compte rendu de cette production salue le reste de la distribution, notamment Sophie Koch, grand titulaire du rôle de Charlotte comme l’illustra une prestation à Bruxelles voici trois ans. Habitué du héros goethéen (dans la version baryton), Ludovic Tézier signe un Albert idéal de froideur et de noblesse tandis qu’Anne-Catherine Gillet compose une ravissante Sophie. L’art du chant français, qui hisse l’articulation au rang de vertu cardinale, est personnifié par Alain Vernhes, qui incarne le Bailli avec une déclamation et une prestance rappelant celles de José van Dam. A la tête d’un orchestre qui délivre de bien séduisantes sonorités, Michel Plasson parcourt cette partition admirable de finesse et d’impact avec une profondeur et une invention qui constituent la griffe des plus grands. La progression vers la mort du poète paraît ainsi inexorable.

Les décors d’André Diot représentent un cadre pastoral et bourgeois convenu mais le résultat s’avère payant, même sur petit écran. Un rien suffit pour évoquer les saisons (quelques feuilles mortes pour l’automne, des flocons de neige à travers une fenêtre pour l’hiver), une juste mesure qui caractérise également le jeu d’acteur, adroit et subtil (les regards, les gestes). Par ailleurs cinéaste, le metteur en scène a conçu la mise en images. Les angles d’attaque s’avèrent parfois originaux, comme ces aperçus du plateau vu de haut et des coulisses – ainsi, pendant l’Ouverture, peut-on voir Jonas Kaufmann se concentrer avant d’entrer en scène. Le procédé brise peut-être la magie du théâtre. Dépourvu de bonus, ce double DVD est néanmoins accompagné d’une notice en français, anglais et allemand qui comporte, outre des notes du metteur en scène (plutôt succinctes) et d’André Tubeuf (dans un style décidément bien à lui), la découpe détaillée en plages ainsi qu’un synopsis.
 
 






 
 
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