ConcertoNet.com, 2 mai 2012
Simon Corley
 
Giacomo Puccini : Tosca
 
Accompagnée d’une sobre notice (en anglais, français et allemand), voici chez Decca la mise en scène de Tosca (1900) par Robert Carsen, créée au printemps 2009 à Zurich. D’habitude plus ingénieux et respectueux de la vraisemblance, le Canadien a rarement aussi peu convaincu, se contentant de décliner au fil des trois actes le bon vieux truc du théâtre dans le théâtre, dans des décors d’Anthony Ward: rangées de chaises alignées face à un rideau fermé au I, où des spectateurs s’installent avant de se lever... pour chanter le Te Deum; coulisses où règne un Scarpia directeur de théâtre au II; scène dépouillée au III.

Superbement éclairée par Davy Cunningham et remarquablement filmée par Felix Breisach, cette production esthétisante, nonobstant les taches de sang et de peinture s’étalant sur les chemises blanches, mêle les époques: celle du livret (1800) et celle d’une représentation au milieu du XXe siècle – Mario fait son entrée avec le Corriere della Sera sous le bras. La figure de la chanteuse d’opéra se situe au cœur du concept, avec Tosca en diva des années 1940 s’abritant derrière des lunettes noires, applaudie par Scarpia après sa prestation dans «Vissi d’arte» et recevant, à la fin de l’opéra, des bouquets que lui remettent des laquais. Dans le même esprit, le programme de salle, dont la couverture consiste en un portrait photo du rôle-titre, sert de fil rouge, distribué aux «spectateurs» par des ouvreurs au I et déposé par Tosca sur le cadavre de Scarpia au II. On relève également des clins d’œil au film noir américain, Tosca évoquant Gilda, au deuxième acte, harcelée par Scarpia sous les lueurs d’un projecteur devant un mur de brique rouge.

La distribution réunie est conforme aux standards de qualité de la maison zurichoise. Aussi à l’aise que dans Wagner ou Massenet, Jonas Kaufmann en constitue l’attraction principale, en puissance comme en suavité et en mezza voce. Avec moins de charisme (et plus de vibrato) que son partenaire, Emily Magee tient néanmoins son rang et entre bien dans le jeu du metteur en scène canadien. Son compatriote Thomas Hampson a perdu de son velours vocal, mais il compose un Scarpia nuancé, pas exclusivement sadique ou lubrique comme tant d’autres, entre faux airs de Bogart et grisaille de quelque régime autoritaire du siècle passé. Les rôles secondaires sont plus que corrects, notamment un Spoletta de luxe en la personne de Peter Straka. Enfin, Paolo Carignani dirige plus généreusement que subtilement un orchestre aux sonorités germaniques, parfois même étrangement wagnériennes.




 
 






 
 
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