Resmusica, 24.10.2009
Andreas Laska
Jonas Kaufmann : L’évolution d’un ténor
 
Il y a plusieurs années que ResMusica suit attentivement la carrière de Jonas Kaufmann en rendant compte des étapes les plus importantes de la carrière de celui qui fut alors une jeune révélation. Depuis, cette carrière a explosé, le ténor allemand étant aujourd’hui l’un des chanteurs les plus demandés du monde. Et Kaufmann a changé de répertoire : le ténor de lyrique des premières années est en train de s’approprier des rôles de plus en plus lourds. En témoigne son nouveau récital dont une bonne moitié est consacrée à Richard Wagner.

Mais cet album témoigne également d’une évolution vocale problématique. Car, pour pouvoir aborder les Lohengrin, Parsifal, Don José et autres Don Carlos, Jonas Kaufmann s’est aventuré dans une émission de plus en plus basse, grossissant son médium au détriment du placement et de la projection de la voix. Si l’aigu n’en a pas (encore ?) souffert, les sons engorgés dans le médium (depuis toujours un point faible du chanteur) se sont multipliés. Dommage…

Un récital raté donc ? Mais non, les choses ne sont pas si faciles. D’abord, il y a toujours la fascination de ce timbre, à la fois viril et rêveur. Il y a également la force unique d’un registre aigu particulièrement vaillant. Et il y a le charisme d’un interprète d’une rare sensibilité. Peut-on imaginer un Lohengrin plus tendre, un Siegmund plus poétique, un Florestan plus bouleversant ou un Parsifal plus ardent ? Et si un Tamino aussi héroïque (aux côtés d’ailleurs d’un Michael Volle superlatif) surprend aujourd’hui, rappelons que Helge Rosvaenge, Rudolf Schock, voire Wolfgang Windgassen ont brillé dans ce rôle.

Si ce récital laisse en fin de compte une impression très favorable, c’est aussi dû à la présence magique de Claudio Abbado au pupitre du sublime Mahler Chamber Orchestra. Car le chef italien n’a rien d’un fidèle serviteur, tâchant surtout de ne pas faire de l’ombre à son divo. Comme Kaufmann, Abbado évite tout ce qui pourrait paraître démonstratif dans un tel album. Ici, on n’a pas aligné des extraits lyriques pour exhiber le talent vocal d’un chanteur. Ici, on a interprété de la musique. Et ça s’entend.
 






 
 
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