
Ah, la longue histoire d'amour entre Jonas Kaufmann et Giacomo Puccini.
Ce disque récital, véritable carte de visite musicale risque bien d'être
un incontournable en cette rentrée 2015. Onze ouvrages, de Manon
Lescaut à Bohème, en passant par les inévitables tubes associés à
Butterfly, Tosca, Le Villi, Edgar, Rondine, Tabarro et Schicchi. Une
fois dit qu'Antonio Pappano et ses forces romaines lui assurent le plus
somptueux tapis musical, que les partenaires (Kristine Opolais, Massimo
Simeoli et Antonio Pirozzi) jouent le jeu à fond dans leurs rapides
répliques, que notre ténor vénéré se montre sous son meilleur jour, nous
tenons là un disque sympathique, vivifiant qui devrait réjouir les plus
atrabilaires. Car le beau Jonas joue de son sex-appeal vocal comme
pas deux, flirtant çà et là avec le lyrico spinto, sans honte et sans
orgueil tant la voix est vibrante, chaleureuse, le tempérament fougueux.
D'une santé vocale à toute épreuve, vérisme ou pas à la clef, le ténor
affiche donc une émission claire, sensible, haut placée, d'une
souplesse, d'une légèreté parfois qui confèrent, par exemple, aux deux
airs de Turandot ou Fanciulla un intérêt qui n'est pas seulement
documentaire. Jonas sait faire frémir, faire vivre un mot, le dire
avec élégance ou panache. Le tout sans grossissement du son, avec une
ligne de chant continue s'appuyant sur le timbre, se fondant sur une
montée progressive et extérieure des sons pour s'épanouir en gerbe sur
l'aigu avec des notes colorées et éblouissantes. Ce disque est une
leçon pour maints ténors qui abordent des rôles à priori trop lourds,
avec hélas souvent une technique moins équilibrée et maîtrisée, et donc
avec un avenir moins assuré.
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