Créée
en 1897, cette version, fort mal reçue au demeurant, interrompit sa carrière
dès 1902. A l’inverse, le Königskinder du MET connut un succès foudroyant,
supérieur à celui de la création de la Fanciulla del West puccinienne, une
vingtaine de jours avant en ce même lieu !
Cela ne suffit
pas et si Hänsel und Gretel est l’ouvrage le plus joué dans les pays
germanophones, en particulier à Noël, Königskinder ne fait que de
sporadiques réapparitions à l’affiche des théâtres. Louons donc comme il
convient DECCA pour avoir planté ses caméras en 2010 à l’Opéra de Zurich
lors de la reprise d’une production de cet opéra créée en 2007. Dans une
mise en scène signée Jens-Daniel Herzog, qui n’échappe pas à une certaine
tendance d’actualisation forcenée et sur laquelle on peut ne pas être tout à
fait d’accord, même si elle réserve quelques beaux moments, un plateau de
premier choix est réuni pour nous conter ce Märchenoper (opéra-conte de
fées) en 3 actes. Comme dans tous les contes, l’histoire est terrible. Ici
il s’agit de deux enfants de roi qui, n’étant pas reconnus, sont chassés de
la ville et vont mourir de froid.
C’est aussi l’histoire d’une
sorcière qui sera brûlée et d’une communauté dont la richesse a asséché le
cœur. Sauf celui des enfants. Sous la direction d’Ingo Metzmacher, les
phalanges de l’Opéra de Zurich sont à la hauteur de l’enjeu. La partition,
dans laquelle souffle la présence wagnérienne, est de celles qui enflamment
le public et portent jusqu’à l’incandescence l’intensité émotionnelle. Deux
rôles importants se partagent l’affiche, celui du Fils du roi et celui de la
Gardienne d’oies. Le premier bénéficie de la présence totalement
électrisante de Jonas Kaufmann. Comédien accompli, ténor au faîte de moyens
inimaginables d’ampleur, de velouté, de musicalité, de puissance aussi, cet
artiste rare incarne à la perfection ce pauvre jeune homme qui, en voulant
acquérir les véritables qualités d’un souverain, va courir à sa perte. Il
est permis d’être moins enthousiaste pour la Gardienne d’oies d’Isabel Rey,
rôle qui fut créé par Géraldine Farrar. Membre de la prestigieuse troupe de
l’Opéra de Zurich, Isabel Rey domine dramatiquement ce rôle, mais tutoie ses
limites vocales à plusieurs reprises. Dans la suite d’une distribution
homogène et de très haut niveau, saluons tout particulièrement le Violoneux
d’Oliver Widmer, la Sorcière de Liliana Nikiteanu, le Bûcheron de Reinhard
Mayr et le Fabricant de balai de Boguslaw Bidzinski.
Un DVD qui
s’impose à toute collection lyrique.
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