Opéra, avril 2016
RICHARD MARTET
 
JONAS KAUFMANN : AN EVENING WITH PUCCINI, Diamant d'opéra
Après sa projection dans les salles de cinéma, au cours du mois de mars, le film An Evening with Puccini sort logiquement en DVD et Blu-ray. Un document qui dépasse la simple captation du concert donné par Jonas Kaufmann, le 14 juin 2015, à la Scala de Milan.

Pendant les dix minutes du Preludio sinfonico (1882) qui ouvre le programme, le ténor vedette raconte en effet la vie de Giacomo Puccini en voix «off», en allemand (sous-titrage disponible en français), de cette très agréable voix parlée qu’on lui connaît. De précieuses images d’archives alternent avec des gros plans sur les instrumentistes et le chef, transformant cette longue introduction orchestrale en un documentaire que l’on regarde avec plaisir.

La captation du concert suit ensuite son cours normal, dans l’ordre chronologique de création des œuvres, en respectant strictement l’alternance entre airs et extraits symphoniques. Barbu et grisonnant, le sourire toujours aussi spontané et sincère, au moment des saluts, Jonas Kaufmann interprète ainsi Le villi, Edgar, Manon Lescaut («Donna non vidi mai» et «Guardate, pazzo son»), Tosca («E lucevan le stelle»), La fanciulla del West («Or son sei mesi») et Turandot («Nessun dorma»).

Par rapport au CD Nessun dorma : The Puccini Album – gravé en studio, en septembre 2014 et paru chez Sony Classical, à la rentrée 2015 – dans lequel figuraient toutes ces pages, à l’exception du «Lamento» de Tosca, le résultat est tout aussi enthousiasmant, aussi bien sur le plan vocal que dramatique (voir O. M. n° 109 p. 80 de septembre 2015). Surtout que nos réserves, qui portaient à l’époque sur l’air de Rinuccio dans Gianni Schicchi et la présence de Kristine Opolais pour les duos de Manon Lescaut et La Bohème, n’ont plus lieu d’être.

Jochen Rieder, c’est certain, n’est pas Antonio Pappano et cela s’entend dans les morceaux purement instrumentaux, comme dans la manière d’accompagner les airs. Mais il remplit honnêtement sa tâche, et l’orchestre de la Scala est d’une qualité équivalente à celui de l’Accademia Santa Cecilia de Rome.

Généreux en bis, Jonas Kaufmann revient à Tosca et La fanciulla del West(«Recondita armonia» et «Ch’ella mi creda», cette fois), avec la surprise de l’enjôleur Non ti scordar di me d’Ernesto De Curtis et du plus rare Ombra di nube de Licinio Refice, page magnifique gravée pour Decca dans l’album Verismo Arias (voir O. M. n° 55 p. 78 d’octobre 2010).

Et comme le public en redemande, le ténor reprend, malgré la fatigue qui pointe, «Nessun dorma», en se trompant dans les paroles ! Riant de lui-même, il réussit à revenir sur les rails et conclut sur un si aigu dont l’éclat soulève le délire dans la salle.

Au bilan, ce DVD, qui ne fait absolument pas double emploi avec le CD l’ayant précédé, livre une image particulièrement sympathique d’un artiste décidément irrésistible.
 






 
 
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