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Opéra Magazine, Octobre 2021 |
LAURENT BARTHEL |
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DIE TOTE STADT À MUNICH
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Le
Bayerische Staatsoper de Munich filme systématiquement ses nouvelles
productions depuis 2011, abondant un fonds d’archives qu’il entreprend,
à présent, de publier sous son propre label. Des CD, DVD et Blu-ray
estampillés « Bayerische Staatsoper Recordings » avec, pour première
parution, cette prestigieuse captation de Die tote Stadt, réalisée en
décembre 2019 (voir O. M. n° 157 p. 46 de janvier 2020).
Il
s’agit indéniablement de l’un de ces spectacles de l’ère Nikolaus
Bachler, pour lesquels l’Opéra munichois aurait pu facilement vendre dix
fois plus de places qu’il n’y en avait de disponibles. Il va désormais
pouvoir être apprécié par un public beaucoup plus large, dans
d’excellentes conditions.
Confort sonore, d’abord, pour une
somptueuse restitution du travail de Kirill Petrenko, à la tête d’un
orchestre de grande tradition wagnérienne et straussienne : la
spontanéité de l’enregistrement sur le vif, mais avec la perfection
technique d’une gravure de studio.
Le timbre de Jonas Kaufmann
est, lui aussi, restitué avec un luxe d’écoute exceptionnel : tout en
miel, ombres et velours, dans un rôle pourtant tuant sur la durée. Et la
perspective est encore plus généreuse pour Marlis Petersen,
perceptiblement étoffée par rapport à la voix plus émaciée que l’on
percevait depuis la salle, rééquilibrage dont on ne va évidemment pas se
plaindre.
Visuellement, aussi, le produit est passionnant. Dans
ce qui fut, en 2016, sa toute première mise en scène lyrique, production
bâloise que Munich a importée, Simon Stone maîtrisait déjà, à la
perfection, des procédés de réactualisation qu’il a, peut-être, eu trop
tendance à ressasser dans ses travaux ultérieurs. Ici, l’équilibre entre
modernité, finesse psychologique et virtuosité scénique est idéal.
De surcroît, le décor blanc et froid d’appartement design
contemporain, dans lequel se déroule toute l’action, passe très bien à
l’écran ; et la réalisation de Myriam Hoyer peut abuser sans dommages
des plans rapprochés, Jonas Kaufmann et Marlis Petersen affichant une
crédibilité et une présence dignes des meilleurs suspenses
hitchcockiens.
Si ni l’un ni l’autre n’ont tout à fait la classe
de James Stewart et Grace Kelly dans Rear Window (Fenêtre sur cour), ce
n’est qu’en raison de leur soumission parfaite à toutes les exigences
d’une mise en scène qui, parfois, se complaît dans un rien de vulgarité
en trop. Mais, pour des chanteurs d’opéra, quel époustouflant travail !
Pour ces deux-là, et pour la direction de Kirill Petrenko, et même
si la mise en scène reste atypique, un document essentiel, à inscrire
tout en haut de la vidéographie de Die tote Stadt.
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