Musikzen, 10 juillet 2016
François Lafon
 
Pistes métaphysiques
A Salzbourg, un Fidelio qui pense plus qu'il n'agit
 
Constatant - après bien d’autres - que Fidelio est musicalement génial et dramatiquement problématique, le metteur en scène « psychanalycisant » Claus Guth, au festival de Salzbourg 2015, a eu l’idée – après bien d’autres – d’en évacuer l’anecdote, en supprimant d’abord les dialogues parlés, qu’il remplace par des bruits étranges évoquant l’atmosphère inquiétante du film de Stanley Kubrick The Shining, et en lançant des pistes métaphysiques, tels ce double de Leonore s’exprimant en langage des signes (incommunicabilité ?) et ce monolithe noir (Kubrick encore, 2001 l’Odyssée de l’espace cette fois) signifiant sans doute que notre destinée (et l’œuvre de Beethoven ?) nous dépasse. Il en résulte un oratorio d’autant plus figé que le chef Franz Welser-Möst s’inspire davantage du geste altier de Furtwängler et Klemperer que des allègements historiquement informés des modernes baroqueux, sans posséder toutefois les qualités démiurgiques des maestros précités. Il va même jusqu’à rétablir l’ouverture Leonore III avant l’apothéose finale, tradition instaurée par Gustav Mahler et abandonnée aujourd’hui. Scéniquement corsetés, les chanteurs … chantent, tous avec conviction cependant, et fort bien pour certains (Jonas Kaufmann en Florestan raffiné, Adrianne Pieckzonka en Leonore grand format, Tomasz Konieczny en Don Pizarro très méchant). Chœurs irréprochables, Philharmonique de Vienne aux cordes plus veloutées que jamais.






 
 
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