Le Figaro, 30/04/2009
Christian Merlin
 
Classique : les références d'aujourd'hui  
Le discophile est un nostalgique impénitent : s'il est prêt, du bout des lèvres, à reconnaître la valeur de tel ou tel enregistrement récent, il en revient toujours aux anciens comme à des références. C'est encore plus flagrant pour l'opéra, où les artistes contemporains sont régulièrement balayés d'un revers de main dans les discographies, pour en revenir encore et toujours à Callas, Tebaldi ou Bergonzi.

Passéistes de tous les pays, écoutez la nouvelle version de Madame Butterfly qui vient de paraître chez EMI, en essayant d'oublier qu'elle a été enregistrée à notre époque. Oubliez ce que vous savez d'Angela Gheorghiu et de ses exaspérants travers de diva : écoutez la magie d'une voix voluptueuse et d'un timbre enchanteur, écoutez la composition d'un personnage crédible, fragile et fort à la fois. Écoutez le ténor Jonas Kaufmann et, passée l'accoutumance à une couleur si sombre, si peu latine, laissez-vous saisir par cette voix ronde et chaude, charnue et ambrée, et par ce magnétisme que même les micros n'atténuent pas. Vous trouverez peut-être la direction d'Antonio Pappano superficielle, et vous aurez raison, mais il sait se faire oublier en étant un soutien loyal à une distribution qui n'est pas un ersatz ou un pis-aller, mais offre bel et bien une grande version, digne de figurer dans les discographies sur le même rang que nos chères vieilles cires.

 
 






 
 
  www.jkaufmann.info back top